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Voyage dans la dissidence sexuelle

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Pulsions fascistes — une introduction

Découvrez ici l’avant-propos et le sommaire du 5ème numéro papier de Trou Noir dont le dossier est consacré aux pulsions fascistes. La sortie du numéro est prévue le 3 octobre 2025 (lancement le jour-même aux Mots à la bouche), il sera disponible en librairie et sur la boutique en ligne de Trou Noir.


Le fascisme n’est pas que haine, destructivité et mort, il promet aussi de répondre à des attentes, des frustrations, des angoisses et des désirs. Dans ce processus de régénération infinie de la race blanche, il capte des libidos, des corps et des affects. Si des milices fascistes partent à la chasse aux Arabes, aux pédés, aux trans, aux gauchistes, c’est pour assouvir un ressentiment , et si des politiciens et des éditorialistes préparent le terrain idéologique à ces ratonnades c’est aussi pour y prendre du plaisir. Les textes rassemblés dans ce dossier explorent ces ambivalences que le fascisme entretient avec le désir.

Dossier Pulsions fascistes coordonné et introduit par Mickaël Tempête.
Partie Varia coordonnée par Trou Noir.
Graphisme de la couverture par les Ateliers Foco.


Pulsions fascistes

Le fascisme est une ligne de fuite qui tourne immédiatement en ligne mortuaire. Mort des autres et mort de soi-même. Le fascisme implique fondamentalement, contrairement au totalitarisme, l’idée d’un mouvement perpétuel sans objet ni but. (...) Il y a fascisme lorsque ce mouvement sans but et sans objet devient mouvement de la pure destructivité. Étant entendu qu’on fera mourir les autres mais que sa propre mort couronnera celle des autres.
(Gilles Deleuze, « Anti-Œdipe et autres réflexions ». Cours du 27 mai 1980, en ligne.)

Gaza. Station balnéaire. Le fascisme nous envoie sa carte postale. Venant de sa part, nous la recevons avec plus ou moins d’étonnement. Un rêve impérial s’offre à nous quotidiennement. Les choses se déroulent comme attendu, une machine à fantasmes bien huilée, le monde est fini mais la brutalité peut s’accroître — les capitalistes ont trouvé une nouvelle utopie pour se la couler douce. Le plan est parfait. La carte postale était déjà là avant qu’on arrive sur les lieux de villégiature, elle est d’abord mentale, comme une représentation psychique d’une excitation corporelle (pulsion), cette drôle de sensation quand on allonge notre serviette sur le sable chaud, à proximité d’un blockhaus et du vendeur de beignets. Ça fait du bien de s’étendre au soleil, face à la mer, badigeonnés de crème anti-UV, étourdis par le bruit des vagues, des chamailleries des enfants et des avions publicitaires. Gaza-Riviera [1], c’est encore plus chic. D’abord un plan et une projection mentale élaborés par l’intelligence artificielle [2], une propagande dealeuse de soulagement, après le génocide le réconfort. Une utopie, donc, au sens premier du terme : un idéal de société future débarrassée des imperfections du réel.

Sous Mussolini, le tourisme des stations balnéaires a constitué un élément important de la propagande du fascisme italien. Il fallait faire venir les touristes du monde entier et pour cela concilier la rigidité du régime avec un bien-être universel [3]. Il a fallu développer et moderniser tout un ensemble architectural et de moyens de transport pour accueillir la possibilité d’une distraction touristique en période fasciste.

Ces utopies venues du passé s’actualisent en s’adaptant à notre époque. En 2017 par exemple, une plage privée située sur les bords de l’Adriatique en Italie, à Chioggia, affichait par l’intermédiaire de panneaux et de messages prononcés dans des haut-parleurs, sa nostalgie mussolinienne. En se rendant vers la mer, on pouvait lire sur un écriteau : « J’aime les gays, j’aime les lesbiennes, j’aime les gens qui se comportent correctement. Ordre, propreté, discipline. » Cette phrase pourrait être aujourd’hui affirmée par n’importe quel homophile d’État qu’on ne l’assimilerait pas à du fascisme. Et pourtant, ce qui est essentiel de relever ici c’est l’association entre la discipline autoritaire, le progressisme libéral et la nostalgie du fascisme. Forcé par la préfecture de retirer ses panneaux représentant le Duce et un autre avec l’inscription « chambre à gaz » apposé sur l’entrée d’une douche, le directeur de cette plage privée est devenu un symbole de la « liberté d’expression » pour les fascistes du Mouvement 5 étoiles et de la Ligue du Nord [4].

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La raison pour laquelle je convoque l’univers de l’industrie touristique du littoral, c’est qu’il se présente comme un écrin idéal pour l’organisation de toutes nos pulsions dites normales ou quotidiennes. Quelque chose qui, évidemment, n’est pas fasciste en soi, mais qui comporte des strates à partir desquelles notre normalité devient une attraction mortifère. Cette industrie des stations balnéaires attire tout type de populations, qu’elles soient bourgeoises ou pauvres, elles leur propose un accès direct à la consommation et au prélassement, mais aussi de faire l’expérience de la frontière ultime : la mer. On ne peut que faire demi-tour après avoir rêvé sur l’horizon [5] et aperçu au loin des bateaux de la Marine nationale, et on se replie vers les restaurants, les glaciers, les bars, les magasins de vêtements et de jeux de plage, les boutiques de souvenirs, les campings, l’hôtel ou la résidence en location, où les hiérarchies sociales se rétablissent immédiatement.

Dans les vidéos produites par I.A. de « Gaza-Riviera », tout ce qui constitue notre normalité quotidienne, à savoir prendre soin de soi, se divertir, se promener en couple, dîner entre amis, admirer un coucher de soleil ou regarder un feu d’artifice, prend une allure morbide. Gardons la chose suivante en tête car j’y reviendrai : il y a d’un côté une guerre en cours et de l’autre une vidéo de propagande générée par I.A. qui imagine l’après-Guerre.

En prenant les pulsions fascistes par ce bout de la normalité occidentale, l’objectif de ce dossier sera de proposer des lectures à même de l’entendre. Il ne suffit pas seulement d’identifier des coupables parfaits (Trump, Milei, Poutine, Netanyahu, Le Pen, Macron, etc.) mais d’interroger la pulsionnalité à l’œuvre qui soutient les adhésions à leurs politiques. Par pulsion, il y a ce que nous entendons dans le langage commun, soit le surgissement d’un désir incontrôlé et incontrôlable, vers un objet de désir qui s’en trouve accablé. En psychanalyse, la pulsion (en allemand Trieb) est un concept introduit par Freud pour désigner une force interne qui pousse l’individu à agir en vue d’une satisfaction, située à mi-chemin entre le biologique et le psychique. Elle trouve son origine dans le corps (un besoin physiologique, une excitation) et son but est la suppression d’une tension (la satisfaction). Cette satisfaction peut emprunter des chemins détournés et se lier à des objets symboliques, culturels ou fantasmatiques. Si la pulsion est sans objet fixe, c’est parce que son énergie peut être détournée à d’autres fins : elle se déplace, se transforme, se refoule ou se sublime.

Salut romain au Duce, Riccione, 1932.
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Puisque j’ai appliqué la notion de fascisme à des dirigeants politiques contemporains, on pourrait légitimement me reprocher de faire une comparaison anachronique et factuellement fausse. Après tout la guerre, l’autoritarisme, la politique sécuritaire et les idéologies rigides et hiérarchiques ne suffisent pas à décrire la spécificité du fascisme. Il y a toujours un problème de définition quand, pris de stupéfaction, on s’empresse de délimiter les atrocités actuelles par le qualificatif qui représente le mal absolu dans l’imaginaire courant : le fascisme. On le fait pour donner un nom à cette menace et la mettre à distance, cela a quelque chose de rassurant ; mais on le fait aussi parce qu’on reconnaît intuitivement, et à raison, une sorte de mouvement général de destructivité qui s’en dégage, qui s’organise et qui gagne du terrain.

Comme vous le verrez dans ce dossier, les pulsions fascistes seront appliquées aussi bien à Jordan Bardella, aux pérégrinations de Mishima, à la littérature de Houellebecq, à la gastronomie nationale, aux feux d’artifice, à la nervosité des dirigeants politiques, aux cris guerriers, à la consommation des marchandises, au développement personnel, etc. Et pour que ce geste soit compris, il va falloir en passer par un accompagnement historique. Pour ce faire, je tâcherai d’être le plus synthétique possible.

Il y a d’une part ce qu’on nomme le fascisme historique, ce fascisme né en Europe dans les années 1920-1930 à partir duquel sont élaborés les critères pour définir ce que le fascisme serait vraiment. Le fascisme historique est selon l’historienne Marie-Anne Matard Bonnuci : « Un mouvement ou un système politique ultranationaliste opposé à la philosophie des Lumières, au libéralisme politique, au communisme. Mouvement-système qui vise à transformer la société et l’individu sur la base d’une conception holistique (qui ne laisse rien de côté) de la société, au moyen soit de la dictature d’un parti unique, soit de l’État et au moyen de la violence. » C’est aussi un régime fondé sur le culte du chef, sur l’antiparlementarisme et sur le recours à la brutalité afin de purger la Nation de ses éléments étrangers. Il est aussi caractérisé par l’application du corporatisme, c’est-à-dire le remplacement de la lutte des classes (entre ouvriers et capitalistes) au profit de la coopération des classes sociales dans un cadre hiérarchique et nationaliste (dirigé par l’État). Émergent donc à cette période, les fascismes italien (Mussolini, l’inventeur du fascisme), allemand (Hitler), portugais (Salazar) et espagnol (Franco) [6].

À partir de cette définition générique du fascisme, il nous faudra bien admettre que les régimes politiques actuels n’y correspondent pas. Mais faisant cela, nous resterions prisonniers du carcan académique des historiens et nous nous rendrions aveugles aux mutations du fascisme. Pour faire quelques pas dans la bonne direction, on pourrait admettre la chose suivante : il ne s’agit pas d’un retour du fascisme ni d’une répétition mécanique de l’histoire, mais de l’apparition d’une forme politique nouvelle qui hérite de certains traits tout en s’adaptant aux contextes démocratiques et néolibéraux contemporains.

Il y a donc d’autre part, ce qu’on appelle néofascisme, postfascisme ou fascisme tardif. Nées des controverses et des conflits sur une impossible définition stable et objective du fascisme, ces notions ont permis d’identifier les formes résiduelles du fascisme historique persistant dans les décennies d’après-Guerre. L’analyse d’une actualité du fascisme après les défaites d’Hitler et de Mussolini, est à considérer dans ses continuités mais aussi dans ses ruptures. À partir de l’adage de Wilhelm Reich selon lequel « le fascisme n’est pas, comme le pensent les libéraux, une simple dictature militaire ou un gouvernement réactionnaire » mais aussi un amalgame d’émotions révolutionnaires et de concepts sociaux réactionnaires.

Dans Fascisme tardif, Alberto Toscano revient sur ces débats intellectuels qui ont animé la culture politique du xxe siècle et revendique l’intérêt de percevoir le fascisme à travers ses contradictions et son manque de cohérence. Ce serait même parce que le fascisme avance de manière illogique qu’il a su séduire une plus large partie de la population. Selon lui, le fascisme tardif n’est pas le symptôme (la conséquence) logique d’une crise politique ou de l’effondrement démocratique mais plutôt la restauration d’une hégémonie libérale : une sortie de crise.

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Néanmoins, cette promesse du fascisme comme réponse à la crise est dépendante de sa non-réalisation, car ce qui fait tenir le projet fasciste, c’est le lien ininterrompu au fantasme de la catastrophe et de l’effondrement. Ce lien, cette unité, sont permis par la guerre illimitée. Et pour la reconduire, il lui faut établir un langage commun capable d’unifier l’ensemble de ses parts illogiques, en attisant sans cesse l’imminence de l’effondrement de la civilisation.

Dans un article passionnant, le philosophe brésilien Vladimir Safatle développe l’idée selon laquelle dans le fascisme, la guerre n’est pas un simple moyen de conquête, mais un mouvement perpétuel sans objectif final, qui ne peut exister qu’en se poursuivant indéfiniment. La guerre devient une « stratégie de report indéfini d’un ordre politique qui s’effondre » [7]. Autrement dit, le fascisme ne cherche pas la victoire (ni la défaite) finale, mais à se maintenir dans une fuite en avant destructrice, où la guerre devient une fin en soi et le seul moyen de préserver, paradoxalement, l’unité d’un ordre politique en ruine. Le fascisme peut être lu comme une machinerie pulsionnelle qui organise socialement une dynamique de mort : il prolonge indéfiniment le mouvement destructif, il retourne ce mouvement contre lui-même, et il alimente un désir collectif d’abolition présenté comme salut. Mais ce processus ne peut être avoué publiquement, c’est la raison pour laquelle l’enjeu de la propagande fasciste est de faire disparaître l’idée que cette brutalité va se retourner contre ses adeptes en présentant un futur modélisé débarrassé des contraintes de la réalité.

Le recours à l’intelligence artificielle dans les vidéos de propagande est l’occasion idéale pour modéliser cette impossible utopie. L’I.A. générative peut fabriquer ex nihilo des réalités entières, cohérentes visuellement, qui n’ont jamais existé. Elle permet de produire rapidement, à faible coût, à l’infini et à grande échelle, des visions utopiques ou catastrophiques sans contrainte du réel : paysages improbables et leaders magnifiés. Cela abolit la frontière entre le réalisme documentaire et la vision propagandiste — une frontière que le fascisme cherchait justement à brouiller.

Cette analogie entre pulsion de mort et fascisme revêt à la fois un intérêt et une limite. L’intérêt est que la notion de pulsion permet de comprendre que le fascisme ne se réduit pas à une rationalité stratégique. Il engage des investissements libidinaux où les individus peuvent agir contre leurs propres intérêts de survie. La limite c’est que la pulsion, chez Freud, a une base biologique et intemporelle, alors que le fascisme est un phénomène historique. Safatle souligne le risque de transformer la pulsion de mort en un « noyau métaphysique » qui naturaliserait la violence politique.

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À la lecture des différentes contributions de ce dossier, on remarque le partage d’un certain constat. Le fascisme n’est pas uniquement une superstructure idéologique imposée d’en haut (fascisme d’État), mais un mouvement qui canalise et organise les flux de désir, en les orientant vers des formes paranoïaques : haine de l’autre, exaltation de l’ordre, soumission au chef, etc. La continuité avec le fascisme historique se situe dans la restauration du corps impénétrable et militarisé en norme ; tandis que la rupture s’effectue dans l’adresse multipliée de cette restauration. Aujourd’hui, par les processus d’assimilation et le besoin de sécurité, les femmes et les LGBT+ font aussi partie du public-cible de la propagande fasciste [8]. Si les phénomènes de fémonationalisme et d’homonationalisme qui en découlent n’en sont que les formes minoritaires et exacerbées, ce qui fonctionne à une échelle plus massive, c’est le conditionnement de la liberté à la doctrine sécuritaire. Invitée dans une émission du Média, la psychanalyste Sophie Mendelsohn prend pour exemple un discours de Jordan Bardella dans lequel il fusionne l’amour du peuple avec l’homogénéité (le Un) de l’État-nation. Se faisant, et il s’agit d’une rupture avec le fascisme historique, ce discours ne s’adresse pas aux masses mais aux affres individuels inquiets de fuir de toutes parts : « L’idée, c’est que quelque chose s’est maintenu d’une logique du fascisme, mais sur le mode microfasciste, un fascisme qui s’est réindividualisé sur l’amour de l’autorité. Car l’autorité garantit, imaginairement, l’intégrité et la sécurité. » [9]

Bien sûr, le fait que des groupes comme Éros ou Némésis parviennent à se faire une place dans les médias doit attirer notre vigilance et notre attention, mais ce qui doit nous inquiéter davantage, c’est notre capacité au repli identitaire, au renoncement à la lutte, à l’effacement dans le divertissement et à la dissolution dans la normativité. Bien que les textes de ce dossier abordent des figures très identifiées aux extrêmes-droites, il ne faudra pas manquer de les lire comme des fantasmes d’autoconservation éminemment partagés. Ce sont moins les fascistes qui nous intéressent que les pulsions dont ils sont le véhicule.

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Ce que nous voulons tenter, c’est d’explorer les différentes dimensions de la pulsionnalité fasciste à partir de points de départ différents mais rassemblés par la communauté de lecteur·ices de Trou Noir. En effet, l’analyse des investissements libidinaux dans les rapports de destructivité contre soi, les autres et le monde, est une des tendances critiques fortes qui porte la revue depuis ses débuts. Il s’agit d’offrir autre chose qu’une comptabilité des effacements historiques des groupes dominés, autre chose que la liste des interdits à laquelle le fascisme nous soumet, il fallait donner à voir l’unité qu’il propose et l’énergie libidinale qu’il est capable de capter.

Si aujourd’hui cette propagande des affects nous préoccupe, c’est que les pulsions fascistes sont entrées dans la matérialité du pouvoir, et ont atteint les limites souterraines de la politique, des administrations, de l’économie et de la communication. En atteignant les structures politiques, les velléités destructrices peuvent plus efficacement mettre en place un contrôle et une ségrégation des populations subalternes (les communautés musulmanes, noires et tziganes, et les blanc·hes « dégénéré·es » et « faibles »).

Et en tant que militant·es antifascistes, la comparaison entre les expressions actuelles du fascisme et le fascisme historique a un sens et devient une question politique majeure dans la mesure où elle doit infléchir en retour une stratégie de résistance adaptée à ces mutations. En conséquence, ni le repli identitaire ni l’innocence ne sont des options.

Mickaël Tempête.

Sommaire

DOSSIER : "Pulsions fascistes"
Coordonné et introduit par Mickaël Tempête
■ Plinio Ribeiro Jr | Déambulations de Mishima au Brésil
■ Julien Martin Varnat | Cris de sang et chants de vie
■ Arnaud Massein | Au temps du sadisme heureux
■ Lou Mousset | Le couteau. Scènes de subjectivation du fasciste français
■ Déborah V. Brosteaux | Pyrotechnies passionnelles
■ Samuel da Costa | Le bouton dégrafé de JB
■ Renaud-Selim Sanli | Tactiques sensorielles du technofascisme
■ Estelle Benazet Heugenhauser | Incontinence Made in Europe

VARIA
■ Lorenzo Bernini & Quentin Dubois| Éléments d’une politique non-héroïque
■ Agustina Arami Ayala | Je vous écris d’argentine

Où trouver le numéro ?

Trou Noir 5 sera disponible en librairie et sur la boutique en ligne de Trou Noir.

[1Je fais référence à deux vidéos générées par l’intermédiaire d’une intelligence artificielle imaginant ce que pourrait devenir Gaza une fois occupée et reconstruite par Israël et les grandes puissances occidentales : gratte-ciels scintillants (dont une Trump Tower à côté d’une mosquée), plages animées, yachts, feux d’artifice et restaurants chics. On y voit aussi des versions virtuelles et souriantes de Netanyahu et Trump (tous deux amaigris), avec leurs épouses, se promenant dans cette ville balnéaire futuriste, vidée de ses habitants palestiniens, accompagnée du slogan : « Nous ou eux ».

[2Je fais référence aux vidéos de modélisation de Gaza-Riviera, construites par I.A. et diffusées par le Président des États-Unis Donald Trump et la ministre israélienne de la Science et de la Technologie Gila Gamliel.

[3Christophe Poupault, « Concilier dictature totalitaire et tourisme. Le régime fasciste italien face à ses ambitions touristiques », Diacronie [Online].URL : http://journals.openedition.org/diacronie/10134

[4Jérôme Gautheret, « Autour d’une “plage fasciste”, l’entente des populistes italiens », in Le Monde, 24 juillet 2017, en ligne.

[5Cet horizon borne autant l’ordre psychique que notre connaissance du monde.

[6Dans cette définition historique succincte du fascisme, je ne m’attarde pas sur les spécificités de chacun de ces régimes. Le cas espagnol est intéressant car il n’a pas toujours été considéré comme fasciste. Les fascismes italien et allemand ont en commun d’avoir objectifiée une « population extérieure » (les Juifs, les tziganes, les homosexuels, les communistes et les handicapés) comme des menaces à la préservation de la race aryenne ou italienne ; tandis que le franquisme a exercé une purge tournée vers l’intérieur, en vue de la rédemption du peuple espagnol qui doit se laver de ses péchés et revenir à sa pureté catholique. Dans le premier cas, ces régimes avaient pour objectif de réaliser une « société nouvelle » à partir d’une vision biologisante de la race ; dans le second cas, il s’agissait d’un retour à une essence perdue à partir d’une vision conservatrice de la race espagnole. Par conséquent, concernant le régime franquiste fut parfois privilégiée la qualification de « régime autoritaire traditionaliste » plutôt que fasciste.

[7Vladimir Safatle, « État suicidaire, fascisme et les problèmes de l’usage politique de la pulsion de mort », in M. David-Ménard et B. Santos, Pulsion de mort : Destruction et créations, Éditions Hermann, 2023, p. 262.

[8Voir, Robyn Marasco, « Reconsidérer la politique sexuelle du fascisme », in Trou Noir, 30 novembre 2023, en ligne.

[9Sophie Mendelsohn, « Après le colonialisme, face au racisme : le projet politique de la psychanalyse », in Le Média, émission en streaming sur youtube. Sophie Mendelsohn est co-autrice avec Silvio Boni de La vie psychique du racisme, Éditions la Découverte, 2021.

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Appel à contributions : Pulsions fascistes

Un appel à textes pour un prochain numéro papier de Trou Noir.